Retrouvez ci-dessous ma tribune publiée mardi 21 juillet dans Les Échos, intitulée « Face à la radicalisation, des solutions européennes » :
L’indignation planétaire suscitée par les attentats du 26 juin nous rappelle que le combat face à cette barbarie criminelle est universel. La concomitance des attentats dans l’Isère, à Sousse et dans une mosquée au Koweït nous l’a tristement prouvé.
Ne tombons pas dans le piège de Daech qui confessionnalise cette lutte pour radicaliser mortellement une partie de la population contre une autre. Ce n’est pas un modèle confessionnel qui veut s’imposer à nous. Ce sont des individus radicalisés par des barbares qui dévoient l’islam, en s’en servant comme une « cause ». Attentat après attentat, nous le vérifions hélas.
La France ne s’en sortira pas seule. L’Europe constitue une solution face au terrorisme et à la radicalisation. Aujourd’hui, trop souvent, nous avançons en rang dispersé, au détriment de notre sécurité et à la grande satisfaction des terroristes.
Au Parlement européen, j’ai été chargée d’un rapport sur la prévention de la radicalisation et du recrutement de citoyens européens par des organisations terroristes. Il y a, aujourd’hui, 4 actions prioritaires à mener :
1. Agir contre la radicalisation par Internet, véritable camp d’entrainement virtuel : des efforts ont été faits par les géants du Net pour retirer des contenus faisant l’apologie du terrorisme, mais trop lentement. Je propose que leur responsabilité pénale soit engagée en cas de manque de coopération rapide. Ils doivent également participer à développer un contre-discours, en agissant sur le référencement pour que ces messages puissent être promus.
2. Développer le renseignement pénitentiaire : un rapport récent a mis en lumière ses failles. A Fresnes, une expérimentation est menée depuis quelques mois : elle consiste en une mise à l’écart des détenus radicalisés, dans le but d’éviter l’imposition d’une contrainte radicale sur les autres détenus. Cette expérimentation doit être généralisée ! Le personnel pénitentiaire comme les aumôniers doivent bénéficier d’une formation adéquate afin qu’ils puissent détecter les comportements radicaux et connaître leur processus. Le renseignement ainsi recueilli serait mieux analysé et mieux utilisé pour prévenir la radicalisation, le passage à l’acte et découvrir d’éventuels réseaux organisés.
3. Assécher le financement du terrorisme : dans mon rapport, j’exhorte la Commission européenne, réticente pour l’instant, à proposer une législation pour mieux détecter les circuits de financement du terrorisme. Il faut aussi développer une relation plus étroite et plus franche, notamment avec les pays du Golfe. J’ai écrit à leurs dirigeants pour leur demander des comptes sur les mesures prises pour une meilleure transparence de leurs flux financiers extérieurs, notamment en Afrique subsaharienne et en Europe. Les Etats européens doivent d’ailleurs être responsabilisés en affichant une transparence dans leurs relations avec ces pays et sur les sommes venues de ces pays versées à des organisations et des associations.
4. Enfin, il y a un sujet d’intégration qui ne peut être éludé. Depuis trop longtemps nous avons cyniquement contribué à la ghettoïsation qui a conduit au communautarisme, qui s’est transformé en radicalisation, pour finir en barbarie ! En 1995, l’affaire Khaled Kelkal était la première alerte que nous avons sous-estimée !
Nous devons refonder l’instance représentative des musulmans de France. Que tous nos compatriotes musulmans puissent y être représentés, s’y retrouver sans devoir faire allégeance à un pays étranger. Revenons, également, à une interprétation apaisée et ouverte de notre principe fédérateur de laïcité. En faisant le contraire, en confessionnalisant les attaques barbares, on donne des armes aux individus radicalisés pour tenter de justifier l’injustifiable.
Dans ce combat, soyons de ceux qui proposent et agissent plutôt que de ceux qui divisent et aggravent la situation.
Lien vers la tribune : http://www.lesechos.fr/idees-debats/editos-analyses/021200603057-face-a-la-radicalisation-des-solutions-europeennes-1138635.php
