Impasse politique et éventuelles nouvelles élections

Les dissensions entre les partis politiques français continuent d’entraver l’examen du projet de budget 2026, avec près de 4 000 amendements présentés à l’examen.

Le gouvernement demeure exposé à un vote de défiance, et l’Assemblée nationale, profondément divisée, ne semble pas plus proche d’un accord sur une version finale du texte, le vote final sur la partie principale étant prévu le 4 novembre.

Cependant, le temps presse et alors que les appels à de nouvelles élections législatives se multiplient, le gouvernement n’a que jusqu’au 15 novembre pour dissoudre l’Assemblée, faute de quoi le pays sera incapable d’adopter ne serait-ce que des lois budgétaires d’urgence pour assurer, par exemple, la collecte des impôts ou le versement des pensions dans les délais requis (voir plus bas).

Quel est l’état actuel des choses ?

Le Premier ministre Sébastien Lecornu a annoncé le projet de budget il y a deux semaines, avec l’objectif d’économiser plus de 30 milliards d’euros.

Plus tard dans la semaine, il a survécu de justesse à deux votes de défiance, assurant sa position pour les débats budgétaires à venir.

Il a promis de ne pas utiliser le mécanisme juridique controversé de l’article 49.3 qui permet l’adoption de certaines lois sans vote au parlement, déclarant que le budget serait ouvert au débat et à la révision par les membres de la Chambre.

Son espoir était que cela conduise à un budget approuvé par la majorité de la Chambre et ainsi pouvoir franchir les étapes nécessaires et entrer en vigueur pour l’année prochaine. Cela éviterait une seconde année sans budget adéquat en place d’ici le 31 décembre.

Cependant depuis sa survie à ces premiers votes de défiance, les choses se sont complexifiées et plusieurs mesures clés incluses dans la version provisoire du budget du gouvernement ont été rejetées par les députés.

Il s’agit notamment d’un plan visant à remplacer l’allocation de 10 % sur l’impôt sur le revenu pour les retraités par une déduction forfaitaire de 2 000 €, le gel de nombreux seuils de l’impôt sur le revenu et une augmentation des impôts sur certaines grandes entreprises. Ces propositions ont été rejetées ou modifiées de manière significative par des amendements déposés par des députés d’autres partis.

Parallèlement, de nouvelles mesures telles qu’une taxe sur les plus-values lors de la vente de certaines résidences principales ont été ajoutées.

D’autres débats signifient que tous les éléments du texte restent susceptibles d’être modifiés avant les votes finaux des députés prévus le 4 novembre (section des revenus) et le 24 novembre (section des dépenses) du texte largement remanié.

Malgré les espoirs de M. Lecornu d’un consensus sur le budget, les partis restent en désaccord sur le texte, chacun ayant ses propres idées sur la manière de lever des fonds — et sur le montant à lever.

Essentiellement, les partis de l’extrême gauche plaident pour des impôts plus élevés sur les plus riches et pour renverser plusieurs mesures du budget initial qui affecteraient les ménages modestes.

Ceux de l’extrême droite, le Rassemblement National, visent à limiter l’impact du budget sur les ménages et s’opposent à toute augmentation des impôts, privilégiant plutôt une réduction des dépenses publiques.

Dans son contre-budget présenté la semaine dernière, le parti affirme pouvoir réduire le déficit de la France encore davantage que sous le budget actuel de M. Lecornu, avec 36 milliards d’euros d’économies supplémentaires, principalement en réduisant les fonds destinés aux organismes publics.

Il affirme également qu’il augmenterait les recettes de l’État de 31 milliards d’euros, ce qui conduirait à environ 45 milliards d’euros de réductions d’impôts pour relancer l’économie.

Ensemble, ces partis ont introduit et/ou retiré plusieurs éléments du texte provisoire.

Les partis plus centristes, tels que les socialistes et les Républicains de droite – les groupes sur lesquels M. Lecornu compte pour trouver un terrain d’entente permettant d’adopter le budget – sont également guidés par leurs propres principes en modifiant le texte.

Les Socialistes ont vu la réforme des retraites temporairement suspendue en échange de leur non-opposition au gouvernement lors des votes de défiance précédents, et cherchent à renverser les réductions de dépenses prévues dans le budget provisoire, en les remplaçant par des impôts plus élevés (bien que moins radical que ceux souhaités par l’extrême gauche).

Pour leur part, Les Républicains, qui ne font plus officiellement partie d’une alliance avec le gouvernement (bien que plusieurs députés du parti soient dans le nouveau cabinet), se concentrent sur la prudence budgétaire et soutiennent en grande partie les mesures visant à réduire les dépenses publiques tout en s’opposant à des hausses d’impôts.

Même au sein du groupe centriste de partis représentant l’alliance macroniste, des divisions sur des mesures clés, notamment les impôts sur les entreprises et la suspension de la réforme des retraites, ont conduit des députés des mêmes formations à s’opposer les uns aux autres sur certains amendements au budget.

Le pari de M. Lecornu d’une Chambre ouverte et d’un budget réussi fondé sur des compromis semble loin d’être assuré.

Des élections prévues avant la fin de l’année ?

Le Parti socialiste estime que son pacte initial consistant à ne pas renverser le gouvernement n’est pas contraignant pour l’ensemble du débat budgétaire, et exige que certaines de ses propositions soient incluses dans le texte final.

Cherchant un compromis, il a proposé une version « édulcorée » de la taxe Zucman sur les ultra-riches, prévoyant des exemptions pour certaines entreprises et entreprises familiales.

Si le gouvernement n’accepte pas l’amendement d’ici le 4 novembre, a déclaré le député socialiste Philippe Brun, le groupe ne soutiendra plus le budget et votera plutôt continuellement contre le gouvernement.

Bien que cela ne soit pas équivalent à un vote de défiance anticipé, M. Brun estime que cela pourrait en effet forcer le gouvernement à démissionner, car obtenir le soutien suffisant d’autres groupes dans l’hémicycle — 289 députés pour former une majorité absolue — semble irréaliste.

Une dissolution de l’Assemblée, ou un vote de défiance réussi (une mesure que le gouvernement a auparavant dit accepter comme équivalente à une dissolution) entraînerait une nouvelle étape d’élections législatives pour élire les députés à l’Assemblée, lors d’une rare élection d’hiver.

Pourquoi le 15 novembre est crucial

Le gouvernement pourrait choisir de ne pas dissoudre l’Assemblée si le vote du 4 novembre échoue et pourrait continuer à chercher un compromis.

Cendant si toutefois il décide d’organiser de nouvelles élections, il est essentiel que cela se fasse avant le 15 novembre, en raison des règles régissant la durée des élections et les budgets d’urgence, a expliqué le politologue Benjamin Morel à Franceinfo.

Il doit y avoir au moins 20 jours entre la dissolution de l’Assemblée et le premier tour des élections, et au moins 35 jours avant le second tour.

Si l’Assemblée est dissoute dans les prochaines semaines, cela revient à admettre qu’aucun budget ne sera adopté avant le 31 décembre et à espérer qu’une nouvelle Chambre élue puisse adopter un budget au début de 2026.

En cas de désaccord entre députés et sénateurs sur un budget, des lois spéciales peuvent être adoptées afin de permettre au gouvernement de continuer à percevoir les impôts et à s’engager dans les dépenses publiques au même rythme que l’année précédente, évitant un arrêt complet des services.

Les députés votent ensuite mensuellement pour maintenir les mesures en vigueur, jusqu’à ce qu’un budget pour l’année soit adopté. La mesure est coûteuse et peut coûter des milliards à l’économie en raison de l’incertitude fiscale et des pertes de recettes — mais elle est préférable à un arrêt du fonctionnement du gouvernement.

Ces lois spéciales ont été adoptées en 2024, après que l’ancien Premier ministre Michel Barnier a été écarté lors d’un vote de défiance en décembre.

Cependant, les lois doivent être présentées à l’Assemblée au plus tard le 19 décembre et adoptées avant le 31 décembre. On s’attend à ce que, si elles sont présentées, elles obtiennent le soutien de tous les partis susceptibles d’appuyer une loi budgétaire d’urgence.

Pour que ces lois puissent être avancées, les députés doivent siéger à l’Assemblée. Or, si une élection est en cours, il n’y aura aucun député en fonction.

Si l’Assemblée est dissoute à une date postérieure au 15 novembre, il ne restera pas assez de temps pour que les nouveaux députés votent sur les lois.


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