Il fait partie des produits les plus achetés par les Français. Indispensable du quotidien, présent dans presque tous les foyers, ce produit a vu son prix bondir de façon spectaculaire depuis 2021. En seulement trois ans, il est passé de 1,20 € à 4,90 € en moyenne dans certaines grandes surfaces.
Et pourtant, aucun débat, aucune couverture médiatique majeure, aucune mesure corrective. Comment expliquer un tel silence autour d’un symbole aussi flagrant de l’inflation alimentaire ?
Un produit banal devenu un luxe discret
Il ne s’agit ni de viande, ni d’huile d’olive, ni de café. Le produit dont il est question, c’est le beurre doux en plaquette de 250 g, un incontournable des courses hebdomadaires.
Entre 2021 et 2024 :
- Le prix moyen d’une plaquette de beurre “entrée de gamme” est passé de 1,20 € à environ 2,90 €,
- Les marques nationales classiques flirtent avec les 3,50 € à 4,10 €,
- Les produits dits “premium” ou régionaux atteignent jusqu’à 4,90 €, parfois plus.
Et cette hausse ne fait l’objet d’aucune communication particulière, alors qu’elle impacte directement les budgets de millions de foyers modestes.
“C’est simple, on a arrêté les tartines le matin”, confie Marc, 41 ans, père de trois enfants dans le Nord. “Avant, on achetait deux plaquettes par semaine. Maintenant, on prend une seule et on la rationne.”
Une inflation discrète mais continue
La hausse du prix du beurre n’a pas été brutale. Elle s’est installée lentement, mois après mois, souvent par tranches de 10 ou 20 centimes invisibles, presque acceptables.
Mais sur trois ans, la multiplication du prix par 2, voire 4 selon les marques, est bien réelle. Et cette inflation “à bas bruit” échappe souvent aux radars médiatiques.
“Le beurre est un produit de base. On n’y pense même plus. Et c’est justement pour ça qu’il passe sous le radar”, explique une économiste spécialiste de la grande distribution.
Contrairement à l’essence ou aux pâtes, le beurre ne déclenche pas de grève, de pénurie ni d’émeute. Et pourtant, sa hausse est l’une des plus violentes de ces dernières années.
Des causes multiples… et peu de solutions
Les professionnels avancent plusieurs raisons :
- Coût de l’alimentation animale en hausse, donc du lait,
- Prix de l’énergie pour les usines laitières,
- Demande internationale plus forte, notamment en Asie,
- Marges logistiques et marketing en constante augmentation.
Mais selon certaines associations de consommateurs, ces explications ne justifient pas tout.
“On a vu des hausses de 15 à 20 % sur un trimestre, alors que la matière première n’avait augmenté que de 3 %. Il y a clairement des abus”, estime UFC-Que Choisir.
Et du côté des enseignes ? Peu de transparence. Les rayons se remplissent toujours, les promotions sont plus rares, et le consommateur s’adapte… en silence.
Un révélateur du décrochage social
Au-delà du simple beurre, cette augmentation symbolise la perte de repères dans le quotidien de nombreux Français.
“Quand le beurre devient un produit qu’on regarde à deux fois avant de mettre dans le caddie, c’est qu’on a franchi un seuil”, résume une travailleuse sociale en Île-de-France. “C’est la disparition de l’abondance ordinaire.”
