Vendredi dernier à Bruxelles, 10 grands groupes énergéticiens tiraient la sonnette d’alarme. La sécurité énergétique tant recherchée, on n’y est pas. Si nous persistons dans une politique énergétique européenne à la fois incohérente et désunie, nous nous exposons notamment à des risques de black-out, symbole s’il en était du mal qui ronge aujourd’hui le système énergétique européen.
Lundi, le Commissaire Oettinger, chargé de l’Énergie, n’a pas eu d’autre choix que de répondre que leurs critiques étaient justifiées. La Commission a aujourd’hui une obligation de résultats.
Les énergéticiens n’en sont pas à leur premier fait d’armes. Ils sont d’ailleurs – certains pourront y voir un paradoxe – en train de devenir les meilleurs alliés des consommateurs face à l’attentisme de Bruxelles.
En fixant des objectifs clairs pour la politique énergétique, le traité de Lisbonne, entré en vigueur il y a 4 ans, avait pourtant nourri tous les espoirs.
Au Parlement européen, nous n’avons pas à rougir de notre bilan. La création d’un mécanisme d’interconnexion pour l’Europe (MIE) a été, en particulier, une avancée notoire sur laquelle le Parlement s’est fortement engagé. La sélection, lundi, par le Commissaire Oettinger de 250 projets éligibles au financement dans le cadre du MIE, visant notamment à transporter l’électricité ou à transporter et stocker le gaz, est une démonstration de sa pertinence pour améliorer la sécurité d’approvisionnement.
Mais le rôle du Parlement européen n’est pas de donner l’impulsion. Je déplore le manque de volontarisme de la Commission européenne, comme des États. Face à la montée de l’euroscepticisme, voilà pourtant un domaine où l’Europe peut se montrer utile et protectrice !
Car le résultat aujourd’hui, c’est que les États agissent encore très largement en ordre dispersé, au détriment de notre sécurité énergétique, des prix pour les particuliers comme les entreprises, et donc de notre compétitivité. Les exemples, hélas, ne manquent pas !
C’est une inégalité des Européens face à la facture énergétique. C’est, en particulier, une fiscalité de l’énergie qui diffère d’un État à un autre.
Ce sont des transitions énergétiques incohérentes. C’est, en particulier, l’abandon du nucléaire en Allemagne qui a un effet domino sur le reste de l’Europe et ses conséquences invraisemblables comme le recours massif au charbon, polluant, importé des États-Unis.
C’est aussi la question du gaz de schiste qui mériterait un grand débat européen : aujourd’hui certains États n’autorisent pour l’instant que les recherches, d’autres l’exploitent, quand d’autres encore ne veulent pas en entendre parler.
Et alors qu’on observe une incohérence entre les États, l’incohérence on la retrouve également dans la politique menée au niveau européen.
L’Europe est, en particulier, prisonnière d’objectifs énergétiques et environnementaux parfois contradictoires. L’échec du système d’échanges des quotas d’émission en est le meilleur exemple. L’UE l’a rendu inefficient en multipliant des objectifs souvent incohérents de réduction des émissions, d’efficacité énergétique et de développement des énergies renouvelables.
L’Europe privilégie les énergies renouvelables, intermittentes par nature, dont les subventions faussent aujourd’hui le marché et menacent les centrales à gaz pourtant vitales pour notre sécurité d’approvisionnement.
Ce serait un acte fort, un tournant dans la politique énergétique européenne, si l’Europe répondait à l’appel des énergéticiens et mettait un terme aux subventions dans des technologies d’énergies renouvelables matures en les intégrant de manière progressive aux règles du marché. Nous ne pouvons plus mener une politique qui va à l’encontre de l’intérêt des Européens, des prix et de la sécurité énergétique.
La page Barroso est déjà tournée. Et c’est tant mieux. Nous devons exiger des candidats à sa succession qu’ils s’engagent fermement à faire de l’Europe de l’Énergie une réalité.